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ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE AUPRÈS DES SCOLAIRES



[…] tout être humain normalement constitué est né avec le don de la musique, comme celui de la parole. Si tel est le cas, alors la vie concertante actuelle, qu'il s'agisse de musiques "classique" ou "populaire", dans laquelle les êtres "de talent" ont le pouvoir de produire de la musique pour la majorité des "sans talent", est fondée sur le mensonge.

Christopher SMALL, Musiquer



Il y a, au cœur de la démarche de l’Ensemble Offrandes, et comme en écho aux mots du musicologue Christopher Small, la conviction qu’un lien s’est rompu, il y a bien trop longtemps, entre la personne qui imagine le son, celle qui produit le son et celle qui reçoit le son. Comme si chacun(e) était assigné(e) à une fonction étanche – rendant par là-même difficile la fluidité entre musiciens et publics.

C’est parce que nous pensons qu’il n’y a pas d’assignation, mais seulement des habitudes un peu trop ancrées, véritables « repoussoirs », que nous avons eu à cœur, depuis les débuts d’Offrandes en 2010, d’imaginer des formats nouveaux, souples, en permanente métamorphose. L’expérience de centaines de dates, d’ateliers, de rencontres nous ont prouvé que la musique en elle-même n’était que pour très peu dans le fait que trop de gens ne se sentent pas invités à pousser les portes de nos théâtres, de nos salles, à partager nos propositions. En cause : la manière, les codes, les jargons, les réflexes d’entre-nous.

Et c’est en prenant le problème « à bras le cœur » que nous avons imaginé quelques rituels par lesquels Offrandes s’invente et se réinvente depuis plus d’une décennie…

L’Éducation artistique et culturelle, entendue généralement dans le cadre de l’école, fait partie de cette constellation de rituels dont les frontières sont poreuses. C’est pourquoi nous ne proposons pas de page uniquement dédiée à l’EAC, mais bien une description de certaines des formes que nous avons imaginées, pouvant s’inscrire dans des interventions scolaires comme dans d’autres lieux.

La Fièvre du samedi matinLien
Née d’une discussion avec nos amis de la Fonderie, au Mans, en 2010, la Fièvre du samedi matin est un atelier d’écoute unique en son genre, proposé chaque premier samedi du mois à 11h en entrée libre (de septembre à juin) à la Fonderie. Autour d’un thé, d’un café, chacun(e) peut venir, avec ou sans enfants, rester tout ou partie de la séance (d’une heure environ) pour partager ce rituel qui peut prendre de nombreuses formes : clefs d’écoute, analyses d’œuvres, improvisations, déambulations, jeux participatifs, zooms sur un instrument, invitations, cartes blanches à des ensembles, solistes ou compositeurs… En juin 2022, 120 Fièvres du samedi matin avaient été ouvertes à la Fonderie, sans que le succès ne se démente.

La Fièvre contagieuse
Fort du succès des Fièvres du samedi matin, des ateliers d’écoute à d’autres moments, dans d’autres lieux, ont voyagé en France ou à l’étranger. Les formats partagés en sont encore plus multiples, car épousant les lieux d’accueils multiples eux aussi (salles de concerts, écoles, lieux d’enseignements artistiques, hôpitaux, centres pénitentiaires, EHPAD, etc.).

La PholharmonieLien
Née de l'enthousiasme des musiciens d'Offrandes pour inviter les publics les plus éloignés de leurs répertoires de prédilection à partager l'acte musical, la Pholharmonie est un orchestre singulier où chacun (musicien ou non-musicien, adulte ou enfant, handicapé ou non) peut venir apporter son talent, sa personnalité au sein d'un processus de création collective.

C’est sur une proposition des Rencontres Encore Heureux à la Fonderie (https://www.rencontresencoreheureux.org) que l’Ensemble Offrandes imagine une première Pholharmonie en 2013 :


À partir d'œuvres de la tradition musicale occidentale, et en interrogeant les formes qui les ont vu naître (concerto de soliste, forme sonate, forme en arche, etc.), les musiciens d'Offrandes proposent à tous une expérience sonore originale.

Utilisant des objets trouvés (matériaux de récupération aussi bien qu'instruments joués traditionnellement ou détournés de leur emploi premier) ou les voix des participants, sont interrogés les liens qui font la musique : le contraste, l'opposition, l'accumulation, la continuité, le solo et le tutti, l'extension vocale par l'instrument... C'est aussi une volonté de dé-hiérarchiser les rapports : si un soliste de l'ensemble pourra, par la maîtrise extrême de son instrument apporter un grain net dans l'image sonore recherchée, le tutti constitué par les participants (généralement inexpérimentés musicalement), travaillera un grain flou, dense – et que seul le nombre peut créer, avec une richesse, une complexité inouïe.

En un temps très court (de 2h à un week-end) une forme peut être restituée à un auditoire, dans un grand plaisir et ce grand étonnement de « faire le beau ensemble ».